Par Sahondra Rabenarivo
La loi, dit-on, est l’expression de la volonté générale. Ainsi, du moins, dispose l’article 6 de notre Constitution. En théorie, le vote de la loi est au cœur même de la démocratie. Mais tous ceux censés y participer n’assument pas pleinement leur rôle : classe politique, médias, société civile, intelligentsia, bailleurs, institutions, électorat… Tous ceux là que nous voyons pointés du doigt en ce moment pour avoir été au moins partiellement responsables de nos crises récurrentes.
Un élément majeur du débat sur la Constitution en 2010 tournait autour de la centralisation et la concentration du pouvoir. Même les lois, malgré la séparation théorique du pouvoir, émanaient du Président. Elles étaient rédigées, votées, promulguées et même publiées pratiquement à huit clos. Loin d’un processus démocratique, la loi était la volonté du plus fort (c-à-d celui au pouvoir). Pourquoi ?
Initiative des lois. Les lois sont présentées au Parlement par voie gouvernementale (projet de loi) et par voie parlementaire (proposition de loi). Je ne connais aucune loi votée ces 10, 20, 30 dernières années qui fut proposée par un parlementaire. Les lois de sources gouvernementales sont, elles, quasiment toutes proposées dans le cadre soit de l’ « habituel », soit de réformes, ces dernières souvent poussées par un bailleur quelconque. Ces réformes font rarement, sinon jamais, l’objet de discussion lors des campagnes politiques, surtout présidentielles.
Partis politiques sans projets. Politiciens sans discipline de parti. Face aux projets de loi, le parlementaire réagit rarement, surtout sur le fonds. Sans projet politique pour le guider, il a tendance à voir les choses de manière personnelle, comme nous voyons aujourd’hui au sujet du code électoral, on s’intéresse à ce qu’on risque : les sanctions…. On n’a rien à proposer, le parti qu’on représente n’ayant pas de position particulière.
Drafting par les bailleurs. Aide au développement et bonne gouvernance. Beaucoup de nos lois sont en fait bonnes. Par rapport à d’autres pays africains, on nous félicite pour le cadre juridique qui nous gouverne. Les lois régissant le secteur privé ont presque toutes été élaborées par de grands cabinets internationaux financés par les bailleurs de fonds : statuts des ports, fonciers, électricité, mines, LGIM, sûretés, sociétés commerciales. Les bailleurs pensaient que ça irait de soi : une fois la loi adoptée, tout irait comme prévu. Mais ils découvrent maintenant que la bonne gouvernance fait défaut, et je dirai qu’au cœur de ce défaut est le fait que les parlementaires ou le gouvernement lui-même n’a pas rédigé la loi qu’ils sont censés appliquer.
Une société civile peu professionnelle et grandement axée sur le social. De mon point de vue anglosaxon, la société civile a la responsabilité de plaider en faveur de ses constituants. Elle devrait analyser, critiquer, demander, plaider, faire pression sur les représentants parlementaires pour influer la rédaction, la modification, l’annulation d’une loi. Elle le fait rarement, et dans les rares cas, trop discrètement. La société civile doit être disparate, représenter différents points de vue, elle n’est pas, comme nous semblons présumer, monolithique.
Des journalistes généralistes. Avec la révolution technologique, je regarde très souvent les débats télévisés sur la démarche législative en France et aux Etats-Unis. Dans ces cas, très souvent, le journaliste lui-même est fort bien informé, ou du moins, bien briefé. Les articles de presse de Le Monde et du Washington Post montrent tous les angles, vont au fond des choses. Ici, les médias ne comprennent pas le contenu, l’envergure, les conséquences possibles des lois, et ne savent faire défendre par les politiciens leurs choix.
Un électorat peu informé. Il faut être un fanatique, ou un membre de la profession comme moi même, pour s’abonner au Journal Officiel et suivre l’adoption des lois et décrets. Il ne faut pas s’attendre à ce que le citoyen fasse de même. Dans une vraie démocratie l’électeur a quand même une idée générale de la politique de l’Etat : lors des campagnes électorales, les candidats en donnent une première couleur. Suit alors l’introduction du projet ou de la proposition de loi, la couverture médiatique des explications et des débats, la fanfare de sa promulgation, les guides pour son application…. Et s’il s’avère que le politicien n’a pas défendu la cause de ses électeurs, le prochain cycle électoral est l’opportunité pour la société civile et des électeurs de s’en débarrasser.
Du début jusqu’à la fin du processus alors, le gouffre s’agrandit. Du centre à la périphérie, la loi devient plus vague, plus méconnue, et perd toute portée …. Les gouvernants font ce qu’ils veulent. Ainsi fut le cas du Code de la Santé, ainsi apparemment sera le cas du Code de la Décentralisation, ainsi aussi notre avenir démocratique, avec le code électoral.
Le changement a été prôné, mais je ne vois pas en quoi les choses ont changé. Les lois sur le cadre électoral ont été rédigées à huit clos, elles sont à peine débattues (et j’oserai dire comprises), elles seront tardivement publiées (et donc pas à la connaissance du public lecteur), elles ne seront pas médiatisées, la société civile n’aura rien à dire sur le contenu ou ce qui devrait être contenu. Nous en subirons sous peu les conséquences. Et on nous reprochera à nouveau la mauvaise gouvernance.
Le vote des lois suit une boucle, où théoriquement, tout un chacun apporte son point de vue, avec comme résultat l’expression de la volonté générale. Il suffit de s’y mettre. Si seulement, on le voulait vraiment.
Sahondra Rabenarivo
26 mai 2011


Saryteny
27 Mai 2011
Pour parodier Montesqieu ,en fait nous n’avons pas l’esprit des lois ;mais nos traditions et coutumes sont vivaces encore .Jusqu’à quand ?
Je suis tout à fait d’accord que en fait beaucoup de lois et programme ont été votés non pour etre appliquées mais plutot pour encaisser des fonds et je pense que de là aussi vient le gout de l’argent donné aux députés ,car il suffisait de promettre une partie du decaissement aux parlementaires pour que la loi passe ,en fait il n’y avait pas un lobby d’interet opposé pour faire sortir les mefaits ou avantage de la loi .
En fait il y avait la puissance des affaires réelles (entre les mains d’une minorité) et les affaires promises dans les tetes des bailleurs de fond ;et cela creait bien sur un decalage qui profitait aux delis d’initiés . Je me suis souvent demandé d’ailleurs pourquoi Ravalomanana a été condamné pour « conflit d’interet » ,mais pas pour delis d’initiés ? La reponse est que cela aurait été trop simple de debusquer les complices si il y en auraient ;et je suis sur que ces complices sont une nebuleuse constante !
Mais en fait poser la question de la loi c’est aussi poser la question de son fondement et il ne faut pas oublier que avant toutes les lois coloniales et indigenes appliquées d’une façon ou d’une autre à Madagascar ,tous les Malgaches ont vecu des siecles dans un ordre mais pas dans le desordre ;malgré les reprensentations de bon ou mauvais sauvage promu par la civilisation occidentale européenne .
Et justement la grande astuce est de presenter l’ordre en attisant le desordre !
solofoniaina
6 janvier 2012
J’aimerai apporter ici quelques idées à propos de la Réconciliation qui n’arrête pas d’alimenter tous ces fonds de cette maudite crise.
A mon humble avis, une réconciliation nécessite une feuille de route, excusez de l’expression qui est à la mode. Moi je préfère utiliser une charte malgacho-malgache afin que le citoyen malgache se retrouve. Car tout malgache devra connaître tout le milieu auquel il évolue : économique (impôts, douane, nos contributions internationales, les dettes contractées et avec obligation de résultat fiable, honnête) – social (Ecoles, hôpitaux, soins divers, la place des fonctionnaires et des employés du secteur privé, etc …) – Nos moyens de production dans l’exploitation des secteurs divers (Agriculture, élevages, richesses minières, industriels) – une projection à long terme (Education, enseignements, formation des cadres dans tous les secteurs etc …)
La première nécessité, c’est d’avoir une vision commune entre tous les malgaches, une vision du positionnement de Madagascar, une vision interne où l’on pourra définir la place et le rôle du malgache par rapport à Madagascar. S’ensuit, une vision qui gagne l’adhésion générale des malgaches sur notre position face à la communauté internationale. Dans ces deux posotions, il y a nécessité d’une refonte de notre position globale car en fait, il s’agit de reconstruire totalement la Nation Malgache et l’Etat en particulier.
Madagascar a toujours été depuis les mouvements populaires ou plutôt politiques, un centre d’expérimentation des décisions politiques à court terme. Beaucoup de ce qu’on avait décidé ne servait que les intérêts de ceux qui se sont mis à la tête de l’Etat. Et toutes les visions à long terme ne tourne que vers les décisions des pays pourvoyeurs de fonds car Madagascar n’a jamais eu de structures solides et fiables pour décider d’elle-même. Bref, l’avenir dy pays a toujours été décidé par des politiciens résolument tournée vers un minimum d’Etat, un Etat qui n’est qu’un instrument exécutant les missions essentielles dictées soit par les intérêts personnels des dirigeants pouilleux, véreux soit par les missions imposées par nos pourvoyeurs de fonds extérieurs. A travers cela toute une panoplie de mensonges telle Développement, efficacité, Réalisations, Etat moderne etc …, inventées de toute pièce et copiant les inventions occidentales.
D’après moi, tous les dirigeants n’ont jamais compris le sens réel de leurs missions. D’où tous ces problèmes qui surgissent et ressurgissent ne serait-ce qu’à chaque élection. Avec toutes les conséquences que nous vivons aujourd’hui : parti unique – fédéralisme – communisme – Etat de droit – Démocratie – Fokonolona – Environnement et bla et bla et bla.
Tout ce qui est à la mode ailleurs sert de Leitmotiv afin d’obtenir plus de voix au vu des élections. Toutes les interprétations des règles venues d’ailleurs se sont avérées catastrophiques et ne conviennent en rien car improductif.
Le rôle de l’armée elle-même est devenu confus car les dirigeants malgaches n’ont jamais su faire la différence dans chacune de leurs interprétations des lois et des règles en vigueur. Comme si les affaires d’Etat ne sont pour eux que des jeux de rôle qu’ils font et les défont à leurs guises. Ce ne sont pas les événements qui le démentiront.
L’homme de la rue ne peut que se résigner à la destruction du pays devant les diverses provocations de la politique qui ne veut pas chercher les moyens pour relever le pays. Tous les diagnostics virent au rouge mais les remèdes que l’on propose ne sont au fait que des poisons qui rongent et amplifient tout le mal.
L’incapacité de chaque pouvoir à résoudre les problèmes a entraîné la société malgache actuelle dans cette confusion, et on ne voit mal qui pourrait nous sortir de la situation actuelle. Le peuple est inquiet pour son présent et surtout pour son avenir.
Il y a la descente aux enfers de l’ordre public, l’effondrement de l’économie. Le redéploiement du pouvoir exécutif et du pouvoir judiciaire ne sert que l’injustice de tous ordres car les responsables politiques et administratifs ne veulent pas prendre conscience du rôle clef de ce que c’est qu’un Etat. Au contraire, ils mènent la croisade contre le rétablissement d’un retour à l’ordre équitable.
Tout cela se retrouve dans les collectivités décentralisées, le Fokonolona, où l’on propage le courant « populiste »inutile à la vie collective. Le contrôle des comptes y est quasiment inexistant et lorsque cela existe, le service chargé du contrôle ne laisse entrevoir aucune transparence des comptes car il n’y a plus de la probité.
Les intérêts ne sont plus les mêmes entre les tenants du pouvoir et ceux de la Nation : les routes, les adductions d’eau car les fonds sont insuffisants et que l’on presse trop le peuple pour les Impôts à cause des détournements et le partage léonins des deniers publics et même jusque dans les villages où l’on ne sait plus à qui incombent les responsabilités.
Les forêts sont décimées pour l’exploitation des bois de rose alors qu’ un arbre met trente ans avant de pouvoir être exploitable.
A cela s’ajoute le mauvais comportement des hauts responsables politiques et administratifs malgaches. Les responsables politiques confondent administration et intérêts de leurs partis. Si le Ministre est AKFM, tout son staff est AFKM, de même du temps de l’AREMA, du TIKO MADAGASCAR et maintenant du TGV. Vu que les hauts commis de l’Etat sont nommés par leurs partis, leur premier souci est de servir les intérêts des membres de leurs partis sous peine d’éviction.